Trois grands romans anglo saxons de la dernière rentrée littéraire à glisser sous le sapin
Noël, c'est dans presque une semaine.. et si on offrait à un féru de bonne littérature étrangère un de ses romans qui nous ont emballé dans nos dernières lectures?
1.Miracles du sang ; Lisa McInerney ( Edition Joelle Losfeld)
« Ryan met vingt-cinq minutes à couvrir un trajet qui en demande quinze. Il se traine dans les rues, s’attirant les regards apitoyés des ants consternés de l’état dans lequel il est. Ses chairs n’en sont que la vitrine ; Ryan est le résultat de sept ans de méfaits. Il est le fléau de sa propre ville. Cork ne se portera que mieux sans lui. »
Dans les pas de Ryan Cusak, jeune dealer de vingt ans et pourtant déjà pas mal d’ancienneté, qui essaie de monter un business juteux avec la mafia napolitaine. En effet cet irlandais aux racines italiennes a profité de ses visites à sa nonna dans la baie de Naples pour mettre au point un trafic d’extasy avec sa bonne ville de Cork.
Des cachets de première qualité que la jeunesse étudiante des beaux quartiers vont s’arracher. Ryan, pianiste éclairé et DJ branché connait bien la nuit, mais lorsque l’on évolue parallèlement dans le milieu extrêmement hiérarchisé du grand banditisme, il faut vraiment faire attention à tout. Tu vois jeune homme tu aurais dû réfléchir à deux fois avant de coucher avec la belle Nathalie.
Évidemment tu ne savais pas qu’elle était aussi la maitresse de ton boss, mais qui va te croire ?
Ce pourrait être une histoire à la Scorcese, une guerre des gangs avec mafia dans la bonne ville de Cork. Mais dans cette grande cité portuaire d’Irlande, Lisa McInerney s’attache surtout à la dérive d’une jeunesse sans repère. Tragédie shakespearienne, drame racinien avec Bourdieu en sous-texte, la prose de McInerney frappe fort et sec, le lecteur, comme é à tabac, ne doit sa respiration qu’aux lettres que le jeune héros, grandi trop vite, écrit à sa mère trop tôt disparue.
Un roman noir humaniste de haute volée.
2 Argent Animal Michaël Cisco ( Au Diable Vauvert)
"Ce qui détruira notre monde ne sera pas, probablement, les boums des guerres nucléaires ou la bave des eaux qui montent. Ces choses pourraient détruire le monde, mais ne le feront pas. Très probablement, non. Ce monde sera détruit par son économie. L’économie mondiale est devenue incontrôlable. Mais la solution ne consiste pas à la contrôler, non, je ne pense pas.
C’est symbolique, je veux dire, non ! Ça ne l’est pas ! Je ne parle pas symboliquement !
«Mais après une guerre nucléaire, on a une terre morte, dit Arshile Okayev.
—Qui ça, on ?»
Michael Cisco est une des figure de proue d'un mouvement informel que les Anglo-Saxons appellent le « New Weird » ,un genre qui s'affranchissent des catégorisations de genre et de conventions narratives ( tels que Thomas Pynchon ou Jeff VanderMeer ) .
Il raconte dans son dernier en date une histoire particulièrement complexe et barrée dans laquelle cinq économistes. vont créer et développer l’Argent Animal. une monnaie qui, s’affranchissant de certains diktats modernes et contemporains, parviendrait à procréer et à se multiplier de lui même.
Nous voila donc partis dans un thriller complotiste et parfois à la lisière du fantastique dont la.narration non-linéaire rend parfois difficile la compréhension mais qui irmprime la mémoire
On aime cette atmosphère érangeante, ,teintée’obscurantisme ainsi que sa capacité à faire naitre des images à l'esprit.
Les réflexions qu’il soulève, que ce soit concernant l’argent, le capitalisme, l’influence de l’éducation ou des médias ne peuvent qu'interpeller le lecteur et rendre cette histoire follement palpitante !
Michael Cisco, Argent animal, Éditions Au Diable Vauvert
3.Fôret Obscure, Nicole Krauss ( Editions de l'Olivier)
"En fait, Epstein n'était pas sur: de même que ne l'était pas le lent développement de la connaissance de soi, durant ces derniers mois, mais ce n'est qu'à l'instant où son assistante posa la question qu'il sentit vraiment le battement d'ailes de la lucidité au dessus de sa tête. Il n'avait pas envie d'être sur. Il n'y croyait pas. "
Voilà un des événements littéraires de la précédente rentrée littéraire tant «Forêt obscure» arrive tard, plus de dix ans après «L’histoire de l’amour» un roman au succès incroyable qui a fait connaître l’Américaine en .
Le roman de Nicole Krauss est vraiment un superbe roman, très riche en thèmatiques ionnantes ( la survie, la trahison, le nazisme , la famille, la ion) et présentait surtout une construction narrative ingénieuse et très maitrisée au fil de périodes et de lieux différentes qui se répondaient l'un à l'autre.
Plus exigeant encore que "l'histoire de l'amour," le nouveau roman de Nicole Krauss embrasse les mêmes thèmes,la judéité, le travail de mémoire; le poids du é ;la création littéraire, et toujours par le prisme d'une construction littéraire ambitieuse et singulière.
Car c'est à une œuvre exigeante que nous invite Nicole Krauss, à cheval sur deux histoires ; l'une concernant un certain Jules Epstein, un sexagénaire new-yorkais et philanthrope qui dilapide sa fortune au gré d’une crise mystique entre deux rencontres étranges dans les couloirs du Hilton. et l'autre une concerne une certaine Nicole qui commence un roman et qui pourrait être l'auteur elle-même.
Un texte fort et exigeant, où il est question de métaphysique, de théologie . un texte nourri d'intense réflexions philosophiques qui ravira les lecteurs plutôt aguerris à ce genre de littérature peu ible mais profondément intelligente, mais qui laissera de côté ceux qui se sentiront vite perdus par les références et l'éruditionpermanente de l'auteur.
Éditions de l’Olivier, 280 pages, 2018