Théâtre des Célestins : LACRIMA : la pièce événement de Caroline N'Guyen tient toutes ses promesses
Après le film fleuve événement cinématographique du moment, chroniqué aux aurores de ce lundi matin, voici la pièce fleuve événement théâtral du moment.
Caroline Guiela Nguyen revient à Lyon, au théâtre des Célestins (épaulé en l’occurrence par le théâtre de la Croix-Rousse), présenter sa dernière création, Lacrima.
On a vu la pièce pour sa première jeudi dernier et ce fut un éblouissement de tous les instants :
On se souvient encore avec précision du choc reçu à la vision de Saïgon, magnifique spectacle écrit et mis en scène, en 2017, par Caroline Guiela Nguyen, programmé à deux reprises, en 2018 et en 2023, au théâtre de la Croix-Rousse, remontait dans le é et nous emmenait en Indochine en 1956.
On aime tellement le théâtre cardiaque de Caroline Guiela Nguyen, où s'intriquent parcours intime et poids historique, deuil et fraternité, amour et exil, fiction et réel.
Le récit de Lacrima, dernière création en date de la dramaturge, qui e actuellement sur Lyon, pourrait être aussi magique que le laisse présager ce frontispice digne d'un conte de fées.
Toutefois, histoire de larmes plus que d'un vécu heureux, trajectoires de petites mains plus que d'altesse royale, Lacrima dénoue les fils qui, de génération en génération, tissent le secret, exerçant chez les êtres qui en sont le réceptacle inconscient, dans les corps qui en portent les stigmates, une violence muette et irréversible.
Plongé dans trois ateliers de haute couture, entre Paris, Alençon et Mumbai et à travers l'éclatement des abcès putrides contenues dans ces enveloppes charnelles sacrifiées, le spectateur suit avec ion les péripéties de cette robe-trésor, qui traîne avec elle une histoire trop longtemps tue et qui provoque, dans la vie de ceux qui travaillent à sa conception, des cataclysmes dantesques.
Sur fond de secrets de famille, entre Paris et Mumbai, en ant par Alençon, Caroline Guiela Nguyen " brode"- c'est ke cas de ke dure une fiction chorale sur la face cachée de l'industrie de la mode à la manière d'un thriller.
C’est une troupe nombreuse et polyglotte (la pièce inclut des scènes en tamoul, en anglais, en langue des signes) mêlant comédiens professionnels et amateurs qui s’empare avec une maestria incroyable de cette fable fleuve, de plus de trois heures
S’exprimant en français, en anglais, en tamoul ou en langue des signes française, tous les interprètes de Lacrima nous touchent au cœur tant ils incarnent avec une sincérité poignante les lignes de failles de nos enfermements.
Une pièce fleuve qui se regarde un peu comme on regarde une série des plus addictives. La scénographie fait montre d’une maîtrise absolument exceptionnelle du champ et de l’espace. Et l'usage de la vidéo appliquant le principe du split screen, est, contrairement à pas mal de pièces contemporaines récentes, jamais artificielle et sert pleinement le récit, faisant exister le coté " mission impossible" de la réalisation de la robe.
Une des meilleures pièces vu ces dernières années qui confirme Caroline NGuyen comme une de nos immenses autrices du moment.
Lacrima, à voir jusqu’au 21 février au théâtre des Célestins.