[CRITIQUE] Maria : Larraín filme sublimement la (les) diva(s)

Maria , en salles depuis hier, semble presque débarquer en terrain connu désormais. En effet, cette exploration des derniers instants de vie de Maria Callas, célèbre chanteuse d’opéra grecque ayant marqué le XXe siècle de son timbre de voix singulier et son registre de jeu étendu, est mis en scène par Pablo Larraín.
Pour rappel, ce dernier avait entrepris une trilogie de films centré sur des femmes de pouvoir ayant marqué le siècle dernier, des figures de pouvoir certes, mais avant tout marqué par la tragédie.
C’est ainsi qu’on a pu avoir Jackie (avec Natalie Portman) et Spencer (Kristen Stewart en princesse Diana), deux portraits féminins traversés d’une empreinte funèbre.
Maria vient clore cette trilogie, et pour notre plus grand plaisir Pablo Larraín abandonne les quelques expérimentations formelles et autres visions hallucinatoires pour quelque chose de plus accessible et moins prétentieux tout en conservant un coté tres léché au niveau de l'image et de la construction narrative.
Dans ce récit émouvant en forme de journal imaginaire, Maria nous fait revivre les deux dernières semaines de la diva. Le film se glisse dans sa peau comme dans ses rôles, explore son existence flamboyante et douloureuse.

On retrouve ainsi La Callas à Paris en 1977.
Cloîtrée dans son grand appartement du XVIe arrondissement, avec pour seuls compagnons son majordome et quelques domestiques, la chanteuse est désormais en fin de carrière et au crépuscule de sa vie. Subissant une extinction de voix après des années à défier les octaves, accro aux barbituriques et meurtrie par une relation toxique s’étant conclue via l’adultère d’Aristote Onassis,
Maria n’est plus que l’ombre de la diva d’antan !
Très « années 1970 » dans ses textures, dans son grain, le présent est dominé par une palette automnale de circonstance, laquelle palette cède la place au noir et blanc lors des retours en arrière.Larraín traduit le flot de pensées de l’héroïne par un flot d’images dont la teneur réaliste se colore de notes impressionnistes et oniriques.
Le script de Steven Knight prend donc la route du requiem sur 2h, comme l’épilogue d’un grand biopic auquel on aurait amputé toute une narration chronologique et crescendo.
Tant qu’à faire, le créatif scénariste invente même une rencontre avec Kennedy, qui ajouterait bien une prise à son tableau de chasse, mais se fait rembarrer.
Un rôle incroyablement habité par une Angelina Jolie livrant sa plus grande performance d’actrice à ce jour. Angelina Jolie, sans qui le film n’atteindrait jamais les mêmes sommets émotionnels. La dernière fois que la comédienne avait livré une prestation intéressante devant la caméra remonte à « L’échange » le thriller de Clint Eastwood, sorti en… 2008.
Les Français se délecteront de Vincent Macaigne en docteur Fontainebleau, prescrivant sans examiner la diva. Piersco Favino en majordome homme à tout faire confirme qu'au cinéma, il sait ...tout faire !
Bref, Pablo Larraín et son directeur photo Edward Lachman (The Virgin Suicides/Cri ultime ; Far from Heaven/Loin du paradis ; Carol) livent ainsi une Oeuvre mélancolique, poignante et gracieuse, la meilleure de la trilogie, Maria se dépose dans la mémoire avec une douceur trompeuse.
En salles depuis le 5 février 2025.
Distributeur ARP